Mission de la dernière chance en Gambie

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Mission de la dernière chance en Gambie

Le Figaro, 20 Jan 2017

URL: http://www.lefigaro.fr/international/2017/01/19/01003-20170119ARTFIG00305-gambie-la-guerre-des-deux-presidents.php
Plusieurs dirigeants de pays d'Afrique de l'Ouest sont attendus vendredi à Banjul, la capitale gambienne, pour convaincre le président sortant Yahya Jammeh, de quitter pacifiquement le pouvoir.

Après être entrées sur le territoire gambien jeudi après-midi, les troupes sénégalaises et de quatre autres pays d'Afrique de l'Ouest ont finalement décidé de suspendre l'opération, le temps d'une ultime médiation.

Cette mission de la dernière chance sera conduite par le président guinéen Alpha Condé à Banjul (Gambie), afin de convaincre, une dernière fois, Yayha Jammeh de quitter le pouvoir pacifiquement. Le président sortant a jusqu'à midi (13 heures à Paris) pour quitter ses fonctions sous peine de quoi les pays concernés passeront à l'offensive. «Si à midi, il n'accepte pas de quitter la Gambie sous la bannière du Pr Condé, alors les troupes vont passer à l'intervention militaire proprement dite, a déclaré le président de la Commission Marcel Souza à la presse. On a arrêté les opérations et on a donné un ultimatum».

Le Sénégal, unique voisin terrestre de la Gambie, ainsi que le Nigeria, avaient menacé d'intervenir militairement si le président sortant n'acceptait pas de quitter ses fonctions. L'opération a été lancée jeudi après-midi à partir du Sénégal. Les soldats sénégalais ont pénétré «de partout» et «l'ensemble des moyens, terre, air et mer» des forces de la Cédéao a été mobilisé pour cette opération, a affirmé à l'AFP un responsable de l'armée sénégalaise, précisant que des militaires du Nigeria, du Ghana, du Togo et le Mali étaient également impliqués.

Mais Yahya Jammeh reste jusqu'à présent sourd aux pressions exercées par ses voisins de la Cédéao, alors que le président élu le 1er décembre, Adama Barrow, a prêté serment, jeudi. Sa cérémonie d'investiture s'est tenue à l'ambassade de Gambie à Dakar (Sénégal), où il est accueilli depuis le 15 janvier. Tout de blanc vêtu, il a prêté serment sur le Coran. «C'est un jour qu'aucun Gambien n'oubliera jamais», a déclaré le nouveau président qui a appelé à l'unité nationale et notamment les forces armées à se rallier à lui. «J'ordonne au chef d'état-major et aux officiers supérieurs de me montrer leur loyauté en tant que commandant en chef», a-t-il déclaré.

Les rues de Banjul étaient calmes vendredi matin, après les centaines de Gambiens sont sortis jeudi après-midi dans les rues pour fêter l'investiture. Des grappes de manifestants exultaient, criaient, klaxonnaient, certains arborant des T-shirts affichant «Gambia has decided» (La Gambie a choisi), le slogan des partisans d'un changement de régime. Le chef de l'armée gambienne, le général Ousman Badjie s'est joint aux manifestants.

L'ONU donne son «soutien total» au nouveau président

L'intervention de l'armée sénégalaise survient alors que le Conseil de sécurité des Nations unies a soutenu, à l'unanimité, jeudi, les initiatives menées par la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour pousser le président sortant à quitter le pouvoir. Le chef de l'ONU a téléphoné dans la soirée au nouveau président pour lui exprimer son «soutien total».

Les États-Unis ont également affirmé ce jeudi soir qu'ils soutenaient diplomatiquement cette intervention militaire. «Nous la soutenons parce que nous estimons que son objectif est de contribuer à stabiliser une situation tendue et de tenter de respecter la volonté du peuple gambien», a déclaré le porte-parole du département d'État, John Kirby. Il a mis en garde une nouvelle fois contre un risque de «conflit armé» entre partisans de M. Jammeh et ceux de M. Barrow, conseillant aux ressortissants américains de quitter la Gambie et précisant que l'ambassade des États-Unis à Banjul était «provisoirement fermée».

Les membres de la Cédéao et l'Union africaine avaient annoncé qu'à partir de jeudi ils ne reconnaîtraient plus comme président de la Gambie Yahya Jammeh, mais Adama Barrow. La résolution, préparée par le Sénégal, a obtenu le soutien des quinze membres du Conseil, y compris celui de la Russie, qui a souligné que ce texte n'autorisait toutefois pas formellement une intervention militaire en Gambie.